Jacques Duphly (1715-1789)
Jacques Duphly ou Du Phly est un compositeur, organiste et claveciniste français du XVIII°.
Courante en Ré mineur extraite du 1er livre de pièces de clavecin, par Reuben Leatherman.
Pour la petite histoire, j’avais adoré jouer cette pièce que ma chère Madame Gourgues-Magnan, honorable et vénérée professeure de piano de la famille, avait recopié à la main à la bibliothèque nationale lors de ses recherches sur les clavecinistes français. Autant dire que j’avais l’impression de tenir en main l’original ! Le mode mineur et les marches harmoniques m’avaient conquis…
Voici cette même Courante par Françoise Petit. Outre le fait qu’une touche ne marche pas et fait « cling » (!…), vous entendrez les différents registres utilisés pour donner du relief aux répétitions en variant les timbres, moyen aussi de jouer sur des variations de dynamique ce qui n’est pas possible au clavecin (et ce qui le fera tomber en désuétude à la fin du XVIII° avec la naissance du piano-forte, qui pouvait lui réaliser des nuances dynamiques sur un seul clavier grâce au fait que les cordes étaient frappées et non plus pincées).
Voici ce qu’en dit la claveciniste Françoise Petit : Par la qualité exceptionnelle de son oeuvre consacrée entièrement au clavecin, Jacques DUPHLY mérite de figurer aux côtés de Couperin, Rameau ou Scarlatti. Né à Rouen, il sera d’abord organiste dans cette ville, mais il abandonnera sa tribune pour venir à Paris et se consacrera désormais au clavecin. Il publiera quatre livres comportant quarante-six pièces: onze rondeaux, trente-cinq pièces de forme binaire. Parmi ces pièces, huit portent des noms de danses: Allemandes, Courantes, Menuets. D’autres portent des noms célèbres à l’époque: portraits, ou, plus souvent, dédicaces, mais qui cachent encore des rythmes pleins de verve dansante.
L’ensemble de l’œuvre de Duphly tient en quatre livres de pièces pour clavecin, regroupant un total de 52 pièces, dont six avec accompagnement de violon. Il a été célèbre en son temps, installé à Paris comme musicien indépendant, jouant dans les nombreux salons de la noblesse. Son œuvre, exclusivement pour clavecin, est réduite comparativement aux 717 œuvres de Domenico Scarlatti, son contemporain italien installé à Madrid. Elle témoigne cependant de l’évolution de l’écriture musicale de ce XVIII° siècle, et j’ai été surpris de voir le nombre d’enregistrements que lui ont consacré les interprètes clavecinistes contemporains.
Dans le tableau chronologique des compositeurs de clavecin de l’école française des XVII° et XVIII°, on voit que Duphly, né l’année de la mort de Louis XIV et donc au début du règne de Louis XV, en 1715, a été contemporain de Jean-Philippe Rameau et qu’il devait bien connaître la musique de ses prédécesseurs.
Voici comment Françoise Petit présentait ces pièces sur la couverture du disque vinyle :
La seconde suite est en Ut et débute par une Allemande à deux temps, plus rapide que ses illustres aînées, de Bach ou de Rameau. La Boucon était une claveciniste connue dont le nom a été célébré par Rameau dans une «pièce en concert». C’est une très belle Courante dans laquelle nous trouvons ce souffle particulier à Duphly, cette sorte de passion encore contenue par un cadre classique mais qui se révèle par ces intervalles de septièmes diminuées qui parcourent la ligne mélodique et le rythme haletant des parties de basse sur sauts d’octaves: c’est fiévreux et non plus seulement vivant! La Larare doit-elle son nom à ses changements de mouvements, à « la » mesure qui ne comprend que deux témps sur quatre, à l’incroyable difficulté technique de dérouler des groupes de quatre notes en « legato» ou aux ornements qui semblent défier la rapidité instrumentale? Rafraîchissants sont les deux menuets et les deux rondeaux qui suivent, majeur, mineur, et La Millettina qui porte l’indication « Vivement ». La dernière pièce du livre est un « Légèrement» qui souligne sa douce ironie. et peut-être aussi pouvons-nous y trouver le souvenir de l’orgue, l’instrument aux mille coloris. La de Juigné ouvre le quatrième livre, en dédicace, avec un «style noble et tendre». Duphly a-t-il compris qu’il arrivait aux limites des possibilités du clavecin, que la voie était ouverte au piano ?
Françoise Petit : 1er livre de pièces de clavecin, Suite en Do, enregistrement de 1974.
Successivement : 23:45 Allemande 26:11 La Boucon 28:15 La Larare 31:14 Menuets I-II 34:16 Rondeaux I-II 36:55 La Millettina 38:54 Légèrement.
Par Blandine Verlet, autre grande claveciniste, un choix de pièces jouées en croches « inégales » et sur un clavecin accordé au tempérament également inégal (!). Successivement : 27:45 1. La Pothoüin (Livre, 4 no 5) 32:54 2. La Lanza (Livre 2 no 5) 38:25 3. Allemande (Livre 1 no 9) 43:00 4. La Boucon (Livre 1 no 10) 47:17 5. Chaconne (Livre 3 no 2).
Pour suivre les partitions avec une interprétation en valeurs inégales par un.e claveciniste non cité :
https://youtu.be/cMXPduFrNxU?si=OouTHZLLlhBlx7cz
Toutes les partitions des 4 livres de pièces de clavecin de Jacques Duphly sont disponible gratuitement sur ce site : http://jacques.duphly.free.fr/premierlivre.html
Voici une transcription pour guitare (avec une pensée spéciale pour mon cher ancien élève Maxime) de « La Forqueray », par Raphaël Feuillâtre (arrangement de Antoine Fougeray).
Et pour revenir dans l’univers du clavecin en ajoutant une touche d’humour à cette page, un doigt (ou 1000 pattes) dans la musique « moderne », et un clin d’œil aux clavecinistes français : de Jean Françaix (1912-1997) la suite « L’Insectarium » pour Clavecin (1953) dédiée à la grande claveciniste Wanda Landowska, enregistrée ici par János Sebestyén à la radio hongroise en 1967.
Voici successivement : [00:00] I. La Scolopendre [01:38] II. La Coccinelle [03:29] III. L’Argyronète [04:33] IV. Les Talitres [05:46] V. Le Scarabée [07:51] VI. Les Fourmis.