La joie en question
La joie en question

La joie en question

La joie en question

A l’heure où le monde paraît plus déchiré que jamais, que les drames succèdent aux drames, publier un article sur « La Joie » semble particulièrement inapproprié.
Et pourtant… La question de la Joie mérite d’être posée car elle est liée à la Vie, dans la mesure où elle est conséquente d’une façon de vivre.
La dimension spirituelle, pour un athée convaincu comme moi, ne renvoie pas à une religion ni même à une croyance.
Elle est la conséquence d’un état d’être qui nous porte plus loin, plus haut que ce que nous pouvons maîtriser volontairement, consciemment.
Cet état de grâce, parfois très éphémère, comme un éclat de rire, nous fait vivre plus intensément l’instant présent.
On peut disserter longuement sur « La Joie ». Ce n’est pas le but de cet article.
Je questionne ici la place de la Joie dans l’éducation musicale, et j’espère montrer qu’elle est partout, pour … la plus grande Joie des élèves et des professeurs !

Cette question un peu provocatrice m’est venue après avoir visionné une série de photos d’enfants prises lors d’un cours d’initiation musicale : du début à la fin de cette leçon, les enfants (de 3 à 4 ans en 1er degré) étaient joyeux, une heure durant !
Ce n’était pourtant pas une séance de cirque !

J’ai déjà tenté de traiter cette question en prenant l’angle de l’humour, mais c’est surtout la question de la joie qui a émergée.
https://pigyki.fr/index.php/2023/09/02/lhumour-en-question/
Ce sujet est pour moi si vital que je souhaite l’approfondir aujourd’hui en laissant l’humour de côté.

Le rapport entre l’humour et la joie

Je pense qu’il y a une distinction importante à faire entre l’humour et la joie.
Tout d’abord, tous les traits d’humour ne sont pas joyeux, loin s’en faut… Et si l’on peut dire de quelqu’un qu’il « fait de l’humour », on ne dira jamais qu’il « fait de la joie » ! C’est dire si la joie est d’une autre nature…
Même en prenant soin de mettre de côté dans l’humour ce qui relève du sarcasme ou de la moquerie, il s’agit toujours d’éléments extérieurs, de situations ou de jeux de mots qui impliquent des choses qui ne nous mettent pas directement en cause.

La joie est de nature plus profonde. Elle relève d’une certaine qualité de vie, ou plutôt, d’un état d’être intérieur qui peut certes prendre naissance grâce à un événement extérieur, mais qui déclenche alors une participation active de l’être tout entier, physique, affective et mentale (pour rester fidèle à la triade willemsienne).

Je pense que la joie est liée à la confiance. Confiance dans les personnes qui nous entourent, et bien sûr, confiance en soi.
Disons que la confiance est un terrain nécessaire, mais pas suffisant pour l’éclosion de la joie.
Et me voilà bien embarrassé par mon sujet ! Car je n’ai aucune prétention philosophique, alors qu’il nous conduirait pourtant à ce type de réflexion…

Quelques définitions…

Elles s’imposent pour mieux cerner ce sujet, et je vais les chercher sur internet (ne faut-il pas vivre au présent ?!).

Extrait de Wikipédia

La joie est une émotion ou un sentiment de satisfaction ou de plaisir, qu’éprouve un individu au moment où une de ses aspirations, ou un de ses désirs vient à être satisfait d’une manière réelle ou imaginaire – ou parfois, sans raison apparente. Difficile à définir sur le plan biologique et à distinguer d’autres concepts, la notion de joie recouvre une ambivalence (joie-paix et joie-euphorie) qui entretient une confusion commune. Elle est souvent prise comme synonyme de bonheur ou de plaisir.

Extrait de Philosophie magazine

Du latin gaudium (satisfaction) ou laetitia (« plaisir à jouir d’un bien »). Émotion vive, souvent accompagnée d’un sentiment de plénitude, éprouvée par l’individu lorsque ses désirs et ses besoins sont satisfaits. La joie se distingue donc du plaisir par sa durée et son intensité, mais aussi du bonheur, qui est davantage un idéal. En religion, elle est un don de l’Esprit qui peut mener à la béatitude. Chez Platon, la joie peut être rapprochée de l’enthousiasme éprouvé par celui qui est inspiré comme l’est le poète ou l’amoureux. Elle est alors exubérante dans ses manifestations. C’est une sorte de folie dont Érasme, à la Renaissance, fait la louange. Mais c’est surtout au XVIIe siècle que la joie est repensée par les philosophes rationalistes : Descartes voit en elle l’une des six passions primitives et la définit comme « une agréable émotion de l’âme en laquelle consiste la jouissance qu’elle a du bien que les impressions du cerveau lui représentent comme sien ». Sa cause la rend cependant ambivalente : la joie de l’ivrogne appelle la méfiance. Chez Spinoza, la joie, davantage intellectualisée, témoigne d’un accroissement de la puissance de connaître. C’est « le passage de l’homme d’une moindre à une plus grande perfection ». Pour Nietzsche, elle exprime la volonté de puissance en tant qu’acceptation joyeuse de la vie. De nombreux philosophes français contemporains (en particulier Gilles Deleuze, Clément Rosset, Robert Misrahi, André Comte-Sponville) valorisent la joie pour tempérer le tragique de l’existence, tout en dénonçant l’obligation sociale de vivre dans une « euphorie perpétuelle » (Pascal Bruckner).

Extrait d’un entretien publié dans « La petite fabrique – Magazine » :
La puissance de la joie selon Frédéric Lenoir

Quelle est la différence entre le plaisir, le bonheur et la joie ?

Les trois sont des expériences de satisfaction. La première, que nous faisons tous, est celle du plaisir, la satisfaction immédiate d’un besoin ou d’un désir : j’ai envie d’appeler un ami, je l’appelle, j’éprouve du plaisir. Le plaisir est une expérience quotidienne particulièrement vaste. Le bonheur est plus compliqué à atteindre car c’est un état d’être, une sorte d’état de satisfaction global et durable. Une autre différence est que le plaisir dépend uniquement de causes extérieures, alors que le bonheur dépend à la fois de causes intérieures et extérieures, et notamment de la conscientisation des plaisirs. Épicure nous dit : « Le bonheur commence par être présent à tous les petits plaisirs du quotidien. » C’est parce qu’on est présent au plaisir que l’on va regarder le soleil, boire un verre d’eau, parler avec des amis… et que l’on va créer un “état d’être” de satisfaction global et durable.
Pour atteindre le bonheur, il faut donc faire en sorte que notre satisfaction ne dépende plus uniquement des causes extérieures, mais qu’elle réside dans le regard que l’on porte sur la vie. La sagesse, c’est aimer la vie avec ses hauts, ses bas, ses moments agréables et désagréables sans dépendre uniquement du conditionnement extérieur.
La joie, c’est encore autre chose. C’est une émotion très puissante qui arrive dans certaines conditions. Elle ressemble au plaisir dans le sens où elle ne dure pas forcément longtemps, mais on peut la cultiver afin de la rendre quasi permanente. Telle est la quête de Spinoza : comment fonder un bonheur, donc un état d’être de satisfaction global et durable, sur la joie. On peut aussi rechercher un état de bonheur fondé sur la sérénité, à l’image des bouddhistes et des stoïciens. La joie est donc à la fois une émotion qui ressemble au plaisir et qui peut devenir un état d’être et donc une incarnation du bonheur.

“ Chaque fois qu’un enfant progresse, grandit, découvre de nouvelles choses, il est dans la joie ! ”

Le plaisir et la joie

Qu’est-ce qui les distingue ? Ma première réponse serait que le plaisir est plus éphémère que la joie, mais la joie peut prendre fin très vite quand les conditions extérieures changent. Peut-être le plaisir se commue-t-il en joie quand il dure, qu’il quitte le superficiel pour gagner le cœur de notre être… Je rejoins là Frédéric Lenoir !

Sauf que dans les définitions qui précèdent, le plaisir est conséquent à un désir de quelque chose, plus ou moins attendu.
Or dans le cas de la musique, et notamment du son, je pense que la joie peut se déclencher sans aucune préméditation.
Le point commun avec le plaisir est alors le fait qu’elle est déclenchée par un événement extérieur qui peut nous happer sans prévenir. C’est là qu’intervient le professeur, qui peut grâce à son expérience et ses qualités d’observations, amener ces événements extérieurs au moment propices à une bonne réceptivité de l’élève.

Avec le temps et le rituel des cours, les élèves désireront ces moments de joie. La tâche du professeur sera alors plus délicate, car il devra trouver les moyens de reproduire les situations sans les galvauder, puis de maintenir cet état de grâce le plus longtemps possible…
Étudions quelques situations.

La joie dans les cours d’éducation musicale
Comment faire ?

Pour ça, nul besoin d’être clown. Ça peut aider, mais ça peut aussi être un piège duquel il est difficile de sortir.
Je crois que le ‘secret’ est avant tout d’être joyeux soi-même, au moins au moment d’enfiler son costume de professeur !

En tant que professeur d’éducation musicale (…Willems® ?!), loin d’être des illuminés, nous puisons des forces dans le joyeux partage vécu des principes musicaux abordés pendant nos cours. Le rire spontané des enfants provoqué par de simples contrastes musicaux relève de l’humour, tandis que la joie émerge de leurs visages d’intense intériorité à l’écoute d’une simple clochette ou la résonance d’une cymbale…
Il s’agit de faire confiance au pouvoir du son. Le plaisir provoqué par l’écoute des harmoniques d’une cymbale, approchée de l’oreille après avoir été frappée, est quasiment immanquable ! C’est comme si ces vibrations inattendues, inouïes (au sens propre), mettaient toutes nos cellules en vibration, comme un frétillement … de joie ! Et cette écoute en réclame d’autres, comme autant de gourmandises.

Le développement auditif

De tous les éléments musicaux mis en œuvre dans un cours, je trouve que c’est le plus magique.
Ce moment déclenche la plupart du temps un appétit pour le son qu’il nous faudra assurément assouvir.
Heureusement, nous avons de quoi faire !
Avec tout le matériel sonore recommandé par Willems®, à condition d’y passer un peu de temps.
Si le professeur savoure réellement les sons produits par les clochettes variées qu’il présente à ses élèves, il est probable qu’ils voudront eux-aussi goûter à ces mets délicieux !

Avec le mouvement sonore, le plaisir vient d’ailleurs : non de la qualité du timbre, mais de la variété du mouvement lui-même.
Notez que je parle de plaisir avant la joie.
Ce sont les changements de sens, les variations dynamiques et agogiques qui sont autant de surprises pour les auditeurs.
Si le professeur improvise avec fantaisie en guise d’imprégnation quelques secondes à chaque leçon, non seulement il donnera une grande quantité d’images sonores à ses élèves, ce qui les stimulera pour improviser à leur tour, mais leur fera aussi tendre l’oreille quand ils entendront le chant des oiseaux, et ils s’arrêteront peut-être pour les écouter.

Le sens mélodique

Le développement du sens mélodique passe par diverses séquences : imprégnation, reproduction, invention.
Toutes ces séquences ne sont pas forcément ‘joyeuses’. Ce qui importe, c’est la sincérité de l’engagement du professeur. Elle sera un élément de la confiance déjà évoquée, et une invitation à répondre par le même engagement sincère.
Tout ce que chante l’enfant n’est pas génial, aussi faut-il se garder de commenter par des superlatifs ‘encourageants’…

Le sens harmonique

Dans les premiers degrés, le développement du sens harmonique consiste surtout à recevoir l’accord comme une entité (sirènes ou sifflets à 3 sons, mélodica, piano, guitare…). La reproduction de l’accord sera forcément mélodique avec l’arpège.
Dès que possible, faire chanter l’accord à 3 voix par les élèves. Ça demande des essais, bien sûr, mais dès qu’ils y parviennent, il se dégage du groupe une unité grisante pour chaque individu. C’est de l’ordre de la joie, d’autant plus qu’il s’agit de se fondre dans un phénomène qui dépasse l’individu puisqu’il ne peut pas le réaliser tout seul.

Le sens rythmique par les frappés

Voilà un chapitre éminemment joyeux ! Et pour cause, il s’agit de faire du bruit !
Or l’enfant adore faire du bruit, sans doute pour affirmer sa présence et son existence.
Je ne vais pas détailler tous les éléments d’une séquence de rythme.
Les contrastes sont variés et les surprises nombreuses. On est alors dans la joie de l’action, bien loin de l’humour (encore que…).

Les chansons

Le caractère varie suivant le répertoire, et toutes les chansons ne sont pas ‘joyeuses’.
Pourtant, le ‘plaisir’ de chanter et rechanter une chanson qu’on connaît, qu’on aime bien (parce qu’on la connaît), qui plus est si on la chante à plusieurs dans un bel unisson, portés par une harmonisation valorisante (ce ne sont pas toujours les plus compliquées), alors je pense que ce ‘plaisir’ provoque de la joie.

Les mouvements corporels naturels

Comme pour la séquence de rythme, les mouvements corporels sont toujours joyeux. D’ailleurs ils sont toujours réclamés par les enfants. Courir, sauter, sautiller, galoper, on dirait que les enfants pourraient bouger sans s’arrêter !
Laissez le choix du mouvement à un enfant, il est presque certain qu’il se mettra à courir !
Évidemment, ça peut vite devenir la foire… et cette séquence n’est pas facile à conduire. Mais gardons à l’esprit que l’enfant aime apprendre et progresser. Maîtriser ses gestes, s’arrêter au bon moment, suivre les différentes allures de la musique, improvisée ou enregistrée, ce sont des défis que les élèves aiment relever, à condition que les consignes soient clairement exprimées, et qu’ils comprennent réellement ce qu’on attend d’eux.

Quel bonheur alors de voir un enfant sautiller au bon tempo de la musique !
Oups !… J’ai dit « bonheur » !… Oui, car au moment où l’enfant sautille, il est assurément heureux. Plus encore s’il chante en même temps !

Conclusion

La joie est un élément essentiel de la vie, et l’éducation musicale est un moment privilégié pour la déclencher et l’entretenir.
Car on recherche toujours cette sensation qui nous emporte un moment un peu au-delà de nous-même.

Cela en fait un élément déterminant de la motivation, quitte à fournir quelques efforts pour y parvenir, sachant le plaisir (l’autosatisfaction ?) qui en découlera.

Car finalement, à quoi bon partager ces moments de musique si ce n’est pour être plus heureux ?…

Et pour terminer joyeusement, écoutez et regardez ces 4 musiciennes se délectant du Rigaudon extrait de la Suite de Holberg d’Edward Grieg adaptée à leur quatuor de flûtes à bec, un régal ! Notez que ce quatuor « Woodpeckers Recorder Quartet » rassemble aussi 4 nationalités : Irlande, Suède, Norvège et Danemark, comme quoi la musique dépasse bien les frontières !

Un petit dernier, pour la route… Elle me font mourir de rire autant qu’elles font frétiller mes oreilles !
Vivaldi concerto in C-major RV 443-allegro, à regarder absolument !

Christophe Lazerges – Grenoble – France.

4 commentaires

  1. Magali Murat

    Je crois que chaque séance d’initiation et de solfège est un moment de joie .Pour mes élèves et pour moi. Les élèves arrivent joyeux et curieux de connaitre le programme du cours.
    Ils ont plaisir à se retrouver pour faire de la musique. Je pense que chaque exercice apporte de la joie (joie due à la découverte, à la réussite, à la complicité ) mais c’est lors des chansons que je l’observe de la manière la plus magique.
    Ils ont de la joie à chanter ensemble.
    Pour les plus grands chanter à plusieurs voix des chants avec de belles harmonies est devenu un moment de bonheur.
    Et quand ils quittent le cours je les entends chanter dehors en attendant les parents.
    Souvent les parents me disent: ah c’est joyeux votre cours! et je répond oui et on a bien travaillé!
    Après les auditions les parents me disent :on voit qu’ils on du plaisir à jouer et chanter ensemble.
    Oui la musique peut être une vraie source de joie et c’est pour cela que les élèves reviennent.(et moi aussi!)

  2. Commentaire de Pierre-Marie Villaumié – 6 Juillet 2024

    J’aimerais ajouter une petite réflexion, sous forme d’une légère dissonance, en rapport à ton article sur la joie.
    Ce n’est pas tant une objection qu’une nuance supplémentaire mettant en valeur la tristesse (plus généralement les émotions dites « négatives ») dans le processus créatif. Certes, ton propos se concentre exclusivement sur la transmission pédagogique et l’état d’esprit de l’enseignant pour véhiculer au mieux l’amour du son et de son expression. Néanmoins, il me semble que ce que nous nommons peut-être trop rapidement les émotions « négatives » peuvent avoir une véritable fonction d’éveil et susciter un profond intérêt pour l’expression artistique si elles sont incarnées avec justesse par l’enseignant. Savoir assumer un état émotionnel emprunt de tristesse face aux élèves peut se révéler utile car l’empathie pour la souffrance reste probablement un vecteur très puissant pour se relier les uns aux autres. La notion de « passion » me semble indissoluble d’une certaine dose de souffrance, d’inconfort, de fièvre et d’angoisse. Voir un enseignant démuni, en colère, triste, anxieux, capable, même avec ses émotions, de rentrer en processus de création, quel enseignement pour l’élève ! Surtout dans une société qui valorise, à mon sens, excessivement les émotions « positives » au détriment du limon fertile que constituent toutes les émotions basses, ardentes, tristes et repliées.
    Je pense qu’il est possible d’affirmer l’existence d’une tristesse joyeuse (peut-être la mélancolie ?) qui conduit naturellement dans des zones plus profondes de l’être, nous mettant en contact avec la substance de nos désirs, de nos regrets, de la perte, de la mort et de l’amour.
    Pour tempérer mon propos, je situerais l’incarnation du « négatif » dans un enseignement pour des élèves d’un certain âge (peut-être à l’adolescence ou un peu avant).

    Enfin voilà, c’est une réflexion au réveil en lisant ton blog 🙂 elle n’est certainement pas exhaustive et ne constitue pas une opposition (car c’est un peu en marge de ton propos fort intéressant par ailleurs). Elle se veut une ouverture pour l’inclusion de ses pauvres émotions trop vite attaquées (sous forme de traitement en tout genre et de diagnostic indélicats) dans l’enseignement artistique.

    Pour ma part (et c’est seulement personnel), la tristesse me semble être mon meilleur enseignant, car elle m’apprend à revenir à mon intimité, à appréhender la patience (et dieu sait qu’en art, la patience est presque tout), à élaguer le superflu et entrer dans ma propre singularité. La joie est comme une couche venant s’adjoindre à cet état, une fois que la tristesse à travaillé mon être.

    1. Merci Pierre-Marie pour ton retour.

      Sur le fond, je partage ton point de vue que tu présentes parfaitement.
      Tu as bien relevé que mon article situe la question de la Joie du point de vue pédagogique, et concerne les enfants.
      Les exemples sont pris pour l’éducation musicale des premiers degrés, donc bien avant l’adolescence.

      La tristesse trouve un écho dans la joie à travers la gravité, telle que celle vécue par des religieux (moines et nones).
      La tristesse est évoquée dans les cours d’éducation musicale à travers les chansons.
      Cependant, quand il s’agit ‘d’animer’, de conduire un cours, c’est difficile pour un professeur triste, tu es sais quelque chose.

      Que la tristesse soit un élément propice à la création musicale, j’en conviens, mais elle n’est pas source d’action collective.
      Je note que tu parles d’empathie pour la souffrance, comme vecteur puissant de relations humaines. Je suis d’accord.
      Peut-on parler d’empathie pour la joie ? Je ne crois pas. On parlera plutôt de contagion.
      On peut avoir de l’empathie pour quelqu’un qui souffre, sans désirer souffrir soi-même.
      Tandis que la joie exprimée et vécue par quelqu’un (un professeur) peut donner envie de la vivre soi-même (ce n’est pas automatique !).

      Tu te places davantage au plan de la création que de l’éducation musicale, et effectivement pour des pré-adolescents et adolescents.
      De ce point de vue, on peut parler de la catharsis de l’art qui permet de transcender un état d’âme « négatif » en œuvre d’art, ce qui peut permettre d’apaiser la tristesse. Je l’ai vécu bien souvent.

      Quant au dictat de la pensée positive, je partage ton point de vue ! Vouloir à tout prix que le monde soit beau est simplement déconnecté de la réalité de ce monde et de la nature profondément ambivalente de l’être humain.

      On pourrait encore disserter un moment sur ces questions !

      1. Réponse de Pierre-Marie.

        Oui effectivement je pense que tu as raison de souligner que la tristesse n’est pas une source d’action collective mais plus, dans un cadre créatif, un enseignement de personne à personne. Un professeur russe m’avait transmis quelques chose de sa vulnérabilité et de sa tristesse lors de ses cours et cette transmission n’est probablement possible que dans une forme individuelle.

        J’aime bien aussi l’idée que tu suggères d’une joie « grave » ou « sérieuse » (distinguée déjà dans ton article d’avec l’humour ou la gaieté).
        La question de l’empathie pour la joie est une bonne question 🤔 je dirais qu’il peut y avoir tout de même une forme d’empathie (que l’on ressent paradoxalement dans son absence quand nous sommes joyeux et que l’autre ne nous rejoins pas dans cette joie) mais contagion me semble intéressant. Je méditerai là-dessus.

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