Écoute musicale n°54 Giovanni Pierluigi da Palestrina
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Écoute musicale n°54 Giovanni Pierluigi da Palestrina

Giovanni Pierluigi da Palestrina (1525-1594)

Cette année 2025 marque les 500 ans de la naissance de Giovanni Pierluigi da Palestrina, enfin, à un an près car la date de sa naissance oscille entre 1525 et 1526. Dans tous les cas, c’est une bonne raison de rencontrer sa musique.

Il a principalement composé de la musique religieuse et vocale. Jugez plutôt : plus de 100 messes, 2 Stabat Mater dont un à 8 voix (double chœur) et l’autre à 12 voix, près de 250 motets (à 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 voix) dont 29 sur le Cantique des cantiques, plus de 140 madrigaux profanes et spirituels, ainsi que de nombreuses autres œuvres religieuses. Palestrina a écrit en tout près de 650 œuvres.

Il est célèbre pour la perfection de son contrepoint par lequel les lignes mélodiques se complètent avec fluidité.
Pour illustrer sa manière, voici plusieurs compilations :

Madrigaux (profanes) :
1. Ahi, che quest’occhi miei ch’erano lieti – 2. Vestiva i colli – 3. Quando dal terzo cielo – 4. Se ben non veggon gli occhi ció che vede – 5. Che non fia che giammai dal cor si sgombri

Musique vocale et dérivés instrumentaux sur « Io son ferito, ahi lasso »

Motets (religieux)
1. Sicut Cervus – 2. Super flumina Babylonis – 3. Adoramus te, Christe – 4. Exultate Deo

Messe (Benedictus extrait de la Messe pour le pape Marcelli) et Stabat Mater

Les détails concernant les œuvres rassemblées ci-dessus figurent dans la suite de cet article.


Motets et Madrigaux

Chez Giovanni Pierluigi da Palestrina, compositeur clé de la Renaissance italienne, le motet et le madrigal sont deux formes vocales importantes. Elles se distinguent principalement par leur fonction, leur texte et leur style.

Le Motet
Texte : Le motet est une composition sur un texte sacré, souvent en latin, tiré de la Bible ou de textes liturgiques. Il est conçu pour une utilisation religieuse ou spirituelle.
Usage : Les motets de Palestrina étaient généralement destinés à être chantés dans un cadre liturgique ou religieux, comme les offices ou la messe.
Style : Ils mettent en avant un contrepoint polyphonique strict et une clarté textuelle exemplaire, conformément aux recommandations du Concile de Trente. Palestrina excellait dans l’équilibre des voix et l’expression spirituelle, donnant aux motets une ambiance de recueillement et d’élévation.

Le Madrigal
Texte : Le madrigal est une œuvre profane sur un texte poétique, souvent en italien, mettant en valeur des thèmes comme l’amour, la nature ou des sentiments humains. Ces textes étaient parfois tirés des poèmes de Petrarque ou d’autres poètes de la Renaissance.
Usage : Le madrigal était destiné à un usage non liturgique, souvent pour des performances dans les cercles aristocratiques ou les salons.
Style : Dans ses madrigaux, Palestrina montre plus de liberté expressive que dans ses motets. Ces pièces utilisent des techniques comme le chromatisme, les contrastes rythmiques et des passages homophoniques pour accentuer le texte et les émotions qu’il véhicule.

Résumé des différencesMotetMadrigal
TexteSacré, en latinProfane, en italien
FonctionLiturgique ou spirituelleRécréative ou artistique
Style musical Contrepoint polyphonique strictPlus expressif, parfois chromatique

Bien que Palestrina soit surtout célèbre pour ses œuvres sacrées, ses madrigaux montrent une autre facette de son génie, où il marie poésie et musique avec une subtilité remarquable.

La diminution

La diminution dans la musique de la Renaissance est une technique ornementale qui consiste à diviser une note longue en plusieurs notes plus courtes, ajoutant ainsi de la complexité et de l’expressivité à une mélodie. Cette pratique était courante dans les styles vocaux et instrumentaux et permettait d’embellir une ligne musicale tout en respectant la structure harmonique et rythmique de la pièce.
Exemple : Si une note longue d’une mesure est écrite comme une blanche, la diminution pourrait transformer cette blanche en plusieurs croches ou doubles croches jouées dans le même laps de temps.
Rôle artistique : La diminution reflétait l’esthétique de la Renaissance, qui valorisait l’équilibre entre complexité et structure. Elle permettait aux musiciens d’exprimer leur virtuosité et de personnaliser leur interprétation tout en respectant le cadre stylistique et harmonique établi.
De nombreux madrigaux ont servi de base à ce type de variation se concentrant sur la mélodie principale, souvent au profit des instruments, permettant de mettre en valeur leurs possibilités de virtuosité. Ce traitement musical a ainsi contribué au passage du style de la Renaissance au style Baroque.


Madrigaux

Ahi, che quest’occhi miei ch’erano lieti

Ce madrigal à 3 voix égales est présenté dans deux interprétations différentes : l’une vocale, l’autre instrumentale.
Par l’ensemble Alla Francesca : Brigitte Lesne · Vivabiancaluna Biffi · Christel Boiron
Elles ont choisit de jouer avec la répartition des voix pour renouveler l’intérêt de chaque strophe.

Version instrumentale, aux Lutes, avec « diminutions » (voir plus bas) par le Quartetto di Liuti da Milano :
Emilio Bezzi, Renato Cadel, Stefano Guarnaschelli, Elisa La Marca liuti rinascimentali

Io son ferito, ahi lasso

Madrigal à 5 voix dans trois interprétations différentes, dont une nettement plus rapide, puis à partir de la mélodie principale et sa base harmonique, quelques « diminutions », variations instrumentales au trombone accompagnant le chant, puis au cornet et enfin au violon, parmi de très nombreux enregistrements et adaptations.

Texte original en italien :

Io son ferito, ahi lasso,
perch’io stesso ferii.
Chi mi darà vendetta
s’io stesso son la causa del mio male?
Chi mi darà consiglio,
s’io stesso al mio voler son sì contrario?
Ohimè, che veggio? Ohimè, che sento?
Io vivo in foco, e nel foco languisco,
ma pur io stesso l’accendo e l’alimento.

Traduction en français :

Je suis blessé, hélas,
parce que je me suis moi-même blessé.
Qui me vengera,
puisque je suis moi-même la cause de mon mal ?
Qui me donnera un conseil,
puisque je suis moi-même si contraire à ma volonté ?
Hélas, que vois-je ? Hélas, que ressens-je ?
Je vis dans le feu, et dans ce feu je languis,
mais c’est moi-même qui l’allume et l’entretiens.

Ce texte illustre les thèmes typiques du madrigal de la Renaissance : l’amour et la douleur, exprimés avec des paradoxes et une introspection mélancolique. Palestrina sublime ces émotions par une polyphonie raffinée et expressive.
Par l’Ensemble d’Allegrezza / Direction : Nanneke Schaap (2020)

Par le Pluto-Ensemble / Direction : Marnix De Cat (2022)

Par La Compagnia del Madrigale ℗ Musique en Wallonie (2024)

Ci-dessous quelques exemples de diminutions à partir de ce madrigal.

L’ensemble Sackbut Frenzy présente une version avec une improvisation au trombone sur la ligne du Canto sur la base des divisions écrites de Giovanni Bassano 1(558-1617)
Guy James, contre-ténor – Emily White, trombone – Peter McCarthy, violon – Robin Bigwood, virginal

Versions instrumentales
Par Bruce Dickey, Cornet et Stephen Stubbs – Erin Headley – Andrew Lawrence-King

Par The Rare Fruits Council · Manfredo Kraemer · Giovanni Battista Bovicelli

Vestiva i colli 

“Vestiva i colli” est un madrigal polyphonique à 5 voix. Il s’agit d’une pièce originale, typique de la Renaissance, exploitant un contrepoint complexe.
Par l’ensemble OCTOCLAVES della Cappella Sistina : Cantus: Gianluca Alonzi, Altus: Ekaterina Vilpo, Tenor: Ermenegildo Corsini e Cesare Stoch, Bassus: Giuseppe Nicodemo; Palestrina, Vestiva i colli, madrigale; Walter Marzilli direttore


Motets

Sicut Cervus

Psalm 42:1 Sicut cervus desiderat ad fontes aquarum, ita desiderat anima mea ad te, Deus. As the hart panteth after the water brooks, so panteth my soul after thee, O God
Par les Sœurs de St. Thomas Aquinas de Brooksville / Floride (USA)

Super flumina Babylonis

Par UNT A Cappella Choir Allen Hightower, conductor

Tu es petrus

Par The Choir of Westminster Abbey · Simon Preston (1986)

Adoramus te, Christe

Par le chœur de la Chapelle Sixtine (2011)

O Magnum Mysterium

Par le Westminster Cathedral Choir · Martin Baker (2003)


Stabat Mater (1590)

Pour double chœur, à 8 voix.
Par l’Ars Nova Copenhagen sous la direction de Paul Hillier (2014)

Le même Stabat Mater dirigé en 1963 par Sir David Willcocks et The Choir Of King’s College, Cambridge, presque deux fois plus long ! Autres temps, autres tempi !!!


Missa Papae Marcelli (1562)

Missa Papae MarcelliBenedictus

Ce Benedictus commence par un duo en contrepoint parfait entre Soprano et Ténor puis entrées de la Basse et de l’Alto en imitation : une pureté de lignes incroyable… Le chœur à 4 voix s’étoffe à 6 voix en dédoublant les Ténors et les Basses au moment de Hosanna. Cette fluidité et ces chevauchements n’empêchent pas la compréhension du texte, souvent mise à mal dans la période précédente.

Par The Tallis Scholars
Soprano : Jane Armstrong, Alison Gough, Stephanie Sale, Judy Stell.
Contre-ténor : Matthew Bright, Paul Bropy, Joe Cooke, David Cordier.
Ténor : Joseph Cornwell, Andrew King, Rufus Müller.
Basse : Colin Mason, Francis Steele, Julian Walker, Jeremy White.
Peter Phillips, Direction.

MISSA PAPAE MARCELLI : intégrale par les mêmes interprètes.
[00,01→] Kyrie [04,44→] Gloria [11,00→] Credo [20,54→] Sanctus et Benedictus [28,33→] Agnus Dei 1 et 2


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